ERAMA
 

L’argument du sexe faible : Quelques remarques sur la notion d’infirmitas sexus en droit romain

Marine Bretin-Chabrol, (MCF Lyon 3)

Un citoyen romain sui iuris, c’est-à-dire libéré de la puis­sance pater­nelle et par consé­quent sujet de droit, peut être déclaré inca­pa­ble d’admi­nis­trer ses pro­pres affai­res pour dif­fé­rents motifs, parce qu’il est mineur, parce qu’il est fou, pro­di­gue, ou parce qu’il s’agit d’une femme. Ce(tte) citoyen(ne) est alors placé(e) sous la tutelle d’un tiers, le tuteur, dont l’auc­to­ri­tas doit être appor­tée aux actes que l’inca­pa­ble ne peut accom­plir seul : l’inca­pa­ble est ainsi un sujet de droit privé d’auc­to­ri­tas.

Dans ce contexte, la mise sous tutelle des femmes, tout au long de leur vie (à quel­ques excep­tions près, sur les­quel­les nous revien­drons) est par­fois jus­ti­fiée par l’idée d’infir­mi­tas sexus, de « fai­blesse de leur sexe ».

Nous aime­rions reve­nir sur ce dos­sier afin d’en res­ti­tuer, d’abord, la com­plexité : une lec­ture sché­ma­ti­que­ment patriar­cale de l’ins­ti­tu­tion de la tutelle des femmes à Rome serait erro­née. Par consé­quent, l’emploi du terme sexus est trom­peur : nous ver­rons en effet que la ligne de par­tage entre inca­pa­bles et capa­bles, ou entre inca­pa­bles et sujets privés de droits ne se fait pas selon le sexe. C’est donc en termes de « genre » (au sens de gender) qu’il nous faudra rai­son­ner.