Pour l’époque républicaine, le seul corpus de correspondance dont nous disposons est celui de Cicéron. Les autres textes n’apparaissent la plupart du temps que sous forme de fragments. Ceux-ci ont été rassemblés et édités au cours des années 70 par Paolo Cugusi, dans ses deux recueils des Epistolographi Latini Minores : ce recensement de toutes les mentions de lettres, dans la littérature latine et grecque, permet d’avoir un état de la question épistolaire à l’époque qui nous concerne.
Dès lors que l’on s’intéresse aux correspondants féminins, le nombre de fragments devient plus restreint : treize femmes seulement (de Cornelia à Julie), sur un total de trois cent cinquante personnages.
La nature des textes eux-mêmes pose problème. Sur soixante-neuf fragments, nous ne disposons que de deux textes autographes de longueur conséquente, dont l’authenticité même a été sujette à caution. Les autres lettres ne nous ont été transmises que par voies (et voix) indirectes : réécriture de formules servant de point de départ à une réponse, paraphrase, évocation dans le récit d’un historien, restitution narrativisée de la lettre.
Souvent, le contenu initial est, au fil du temps, de plus en plus réécrit et recomposé par son utilisateur. A travers cette superposition de filtres, la question d’une écriture féminine peut se poser : une typologie se dégage-t-elle ? Quelle est l’influence de l’émetteur et du destinataire ? Le niveau d’insertion du fragment dans un texte cadre (citation, narration) joue-t-il un rôle ? Ainsi, plus que l’écriture d’une émettrice, on y voit souvent l’interprétation du destinataire.
Dans la mesure où nous n’avons à notre disposition que fort peu de textes autographes, une étude stylistique envisageant une écriture sera limitée. Il s’agira de deux extraits de lettres de Cornelia. La question de l’authenticité de ces textes ayant été résolue, nous les tiendrons donc pour autographes, et c’est sur eux seuls que nous pourrons fonder notre étude.