ERAMA

Compte-rendu de la séance introductive du laboratoire junior ERAMA : « Interroger l’autorité dans l’Antiquité »

5 octobre 2012

Lors de notre séance intro­duc­tive, Myriam Revault d’Allonnes (EPHE) nous a pro­posé, avant d’enga­ger notre étude his­to­ri­que en contexte, de reve­nir sur le concept même d’auto­rité qui paraît si impal­pa­ble, et, pour ce faire, elle est partie de la mise en crise de l’auto­rité par la moder­nité. La confu­sion avec le pou­voir qui appelle obéis­sance plutôt que reconnais­sance, l’avè­ne­ment des démo­cra­ties moder­nes, la reven­di­ca­tion d’auto­no­mie de la raison par les Lumières sont autant de pro­blè­mes posés à la concep­tion tra­di­tion­nelle de l’auto­rité. Cette inter­ven­tion nous a ainsi invi­tés à pren­dre le recul néces­saire pour mieux cerner les spé­ci­fi­ci­tés anti­ques, tout en nous rap­pe­lant les gran­des réfé­ren­ces de la réflexion phi­lo­so­phi­que et poli­ti­que sur ces sujets.

Edmond Lévy (Université de Strasbourg) a ensuite sou­li­gné la rareté et la faible spé­cia­li­sa­tion du lexi­que du pou­voir en grec, citant l’exem­ple du mot archôn. Il a pré­senté une étude minu­tieuse des emplois des termes du pres­tige chez Thucydide, dont il res­sort qu’axioma dési­gne un pres­tige plus indi­vi­dua­lisé, plus maté­riel et dont l’ori­gine est loca­li­sée, tandis qu’axio­sis dési­gne le pres­tige de façon plus géné­rale et non quan­ti­fia­ble.

Enfin, Pascale Brillet-Dubois (Université Lyon 2) a cher­ché à expli­quer l’auto­rité dont jouit la figure de Jean-Pierre Vernant dans les études clas­si­ques. Cette inter­ven­tion avait le double inté­rêt, pour notre sujet d’étude, d’éclairer cer­tains res­sorts de l’auto­rité intel­lec­tuelle, et, pour les jeunes cher­cheurs que nous sommes, de s’inter­ro­ger sur nos métho­des et notre rap­port aux auto­ri­tés scien­ti­fi­ques. La dif­fu­sion d’une pensée, sa reconnais­sance par l’ins­ti­tu­tion, sa résis­tance au temps, une per­son­na­lité de « maître de liberté » sont autant d’éléments qui peu­vent fonder l’auto­rité, tandis que la défi­ni­tion de l’objet d’étude, les parti-pris métho­do­lo­gi­ques et idéo­lo­gi­ques peu­vent cons­ti­tuer des limi­tes à cette auto­rité : la figure de Jean-Pierre Vernant ne fait en effet pas l’objet d’un consen­sus, elle est une auto­rité parmi d’autres.

En outre, les dis­cus­sions qui ont accom­pa­gné ces inter­ven­tions ont attiré notre atten­tion sur quel­ques pistes de réflexion à appro­fon­dir au cours de nos tra­vaux.

Par exem­ple :

  • s’il semble acquis que l’autorité repose sur une supériorité reconnue, il reste à mieux cerner les mécanismes de cette reconnaissance. Notre journée d’étude intitulée : « Les figures d’autorité : une affaire de compétences ? » sera une des occasions de revenir sur ce problème. Lecture suggérée : Paul Ricœur, Parcours de la reconnaissance : trois études, Stock, Paris, 2004.
  • dans la figure d’autorité, il faudra faire la différence entre le modèle et l’exemple (qui peut être réactualisé).

Des comp­tes-rendus plus détaillés de chaque inter­ven­tion sont dis­po­ni­bles sur notre carnet de recher­ches : erama.hypo­the­ses.org

G. Hubert