ERAMA
 

F. Mari, « Gage de confiance, signe d’auto­rité : le cas des δεξιαί aché­mé­ni­des »

Francesco Mari (Strasbourg, Gênes)

L’ins­crip­tion de Behistoun dési­gne les hommes du Grand Roi aché­mé­nide par le mot ban­dakā. Issu du radi­cal indo-­‐eu­ro­péen *bhendh, ce terme montre l’impor­tance qu’avait, dans l’idéo­lo­gie du pou­voir monar­chi­que, la fidé­lité que les digni­tai­res devaient à tout moment démon­trer à la per­sonne du roi. De leur point de vue, les Grecs défi­nis­saient les mem­bres de l’entou­rage royal par le terme πιστοί (dignes de confiance). Considérées dans leur ensem­ble, ces deux défi­ni­tions sug­gè­rent un rap­port d’« échange inégal » où à la confiance concé­dée par le Grand Roi doit cor­res­pon­dre la fidé­lité de son subor­donné loyal. La confiance du Roi devient ainsi le pivot autour duquel se déve­loppe une véri­ta­ble idéo­lo­gie de l’auto­rité. La raison en est claire : l’entre­tien du réseau de rap­ports de confiance/fidé­lité était le sys­tème le plus effi­cace pour assu­rer au Grand Roi le contrôle de l’empire perse.

Mais com­ment main­te­nir ce réseau sur le ter­ri­toire, étant donné les énormes dimen­sions de celui-­‐ci ? Dans la com­mu­ni­ca­tion que je pro­pose, j’exa­mi­ne­rai la pos­si­bi­lité que, lorsqu’aucune ren­contre phy­si­que n’était pos­si­ble entre le monar­que et son subor­donné, le Roi renou­ve­lât le lien de confiance/fidé­lité qu’il entre­te­nait avec lui par l’envoi d’un gage en forme de main droite (δεξιά). Transmis uni­la­té­ra­le­ment par le Roi à son sujet, ce gage vise d’un côté à rap­pe­ler la ver­ti­ca­lité du rap­port exis­tant entre les deux ; de l’autre côté, repré­sen­tant une main droite, il mani­feste la nature de ce rap­port de confiance/fidé­lité, en ren­voyant direc­te­ment à la sym­bo­li­que de la poi­gnée de main, « la forme de garan­tie la plus contrai­gnante chez les Perses » selon Diodore.

Une pareille hypo­thèse peut être émise sur la base d’un examen phi­lo­lo­gi­que d’un cer­tain nombre de sour­ces grec­ques et lati­nes qui concer­nent les com­mu­ni­ca­tions à dis­tance entre le Roi et ses hommes.