Les documents épigraphiques d’époque hellénistique sont, pour reprendre des mots de Roland Barthes (Le Degré zéro de l’écriture), « la forme spectaculairement engagée de la parole » : ils relèvent en effet à double titre d’une mise en scène de la parole politique.
Ils sont à la fois publication et publicité et donnent à voir avant de donner à lire : leur dimension monumentale inscrit leur message dans la durée et fait d’eux la mémoire des décisions et actions royales. Mais ils ont aussi une part d’artificialité et d’affectation : l’inscription permet parfois à la cité de sauver les apparences, prise qu’elle est entre son souci d’indépendance et l’emprise qu’exercent sur elle les monarchies hellénistiques, en faisant passer pour sien ce qui est imposé de l’extérieur.
Cyrène n’échappe pas à cette théâtralisation de la parole politique lorsqu’elle passe sous le contrôle de son voisin égyptien ; nous sont ainsi conservés trois documents témoignant de l’influence lagide sur la vie de la cité : le diagramma du diadoque Ptolémée (S.E.G. IX, 1), le testament de Ptolémée VIII Évergète II (S.E.G. IX, 7) et des prostagmata de Ptolémée IX Sôter II (S.E.G. IX, 5), qui s’étendent de la haute à la basse époque hellénistique. La diversité de ces trois documents permet une réflexion nuancée sur ces documents administratifs particuliers : de la nature des décisions transcrites, de la date et des objectifs de la publication, mais également de la nature des relations entre la cité et le roi, dépend le mode de publication choisi par la cité.